La Qualité de Vie au Travail (QVT) est devenue le terme le plus courant en entreprise pour aborder la question des conditions de travail et du bien-être des équipes.
Mais s’agit-il de la même chose ? Quelles différences entre la QVT, la QVCT, le bonheur au travail ou encore les risques psychosociaux (RPS) ? Pour s’y retrouver, voici un petit glossaire, qui ne mâche pas ses mots.
- QVT : quelle définition ?
- QVCT : la dernière née
- Bien-être au travail
- Bonheur au travail : l’impossible définition
- RPS : la définition du rapport Gollac-Bodier
La QVT, c'est quoi ?
définition de la QVT
La définition de la QVT la plus communément utilisée en France est issue de l’Accord National Interprofessionnel du 19 juin 2013. Mais le texte de quelques pages (à télécharger ici dans son intégralité) ne livre pas UNE mais en filigrane plusieurs définitions de la QVT, suivant qu’il s’attache à son objet, à son sens, ou à son contenu.
Les définitions de la QVT les plus souvent utilisées sont les suivantes :
- “La qualité de vie au travail vise d’abord le travail, les conditions de travail et la possibilité qu’elles ouvrent ou non de « faire du bon travail » dans une bonne ambiance, dans le cadre de son organisation.”
- “La qualité de vie au travail désigne et regroupe sous un même intitulé les actions qui permettent de concilier à la fois l’amélioration des conditions de travail pour les salarié.es et la performance globale des entreprises, d’autant plus quand leurs organisations se transforment.”
- “La qualité de vie au travail peut se concevoir comme un sentiment de bien-être au travail perçu collectivement et individuellement qui englobe l’ambiance, la culture de l’entreprise, l’intérêt du travail, les conditions de travail, le sentiment d’implication, le degré d’autonomie et de responsabilisation, l’égalité, un droit à l’erreur accordé à chacun.e, une reconnaissance et une valorisation du travail effectué.”
- “Les conditions dans lesquelles les salarié.es exercent leur travail et leur capacité à s’exprimer et à agir sur le contenu de celui-ci déterminent la perception de la qualité de vie au travail qui en résulte.”
➡️ Ces définitions de la QVT ne s'opposent pas, elles se complètent. Derrière le terme générique "QVT" se cachent parfois des visions très différentes. Aux Ateliers Durables, nous avons ainsi jugé nécessaire de débattre et d'établir notre propre vision de la QVT.
Les grands principes de la QVT
On pourrait néanmoins dire que ces différentes définitions de la QVT, prises ensemble, traduisent l’esprit de la QVT voulu par les négociateurs et négociatrices de l’accord. C’est à chaque entreprise de s’approprier la démarche et de construire sa propre définition, tout en gardant en tête les principes fondateurs :
- les liens indissociables entre la QVT et la performance des organisations
- le savant équilibre entre la dimension à la fois objective des conditions de travail et subjective de la QVT (le sentiment de bien-être perçu collectivement et individuellement)
- les 3 piliers qui fondent la perception de la QVT : les conditions d’emploi et de travail, la capacité à s’exprimer et agir, le contenu du travail
⏳ Pour aller + loin : au cœur de la QVT, on retrouve la notion d'espaces de discussion sur le travail, un temps où les collaborateurs peuvent échanger sur la réalité du travail vécu.
QVCT : la dernière née
Avec l’accord de l’ANI du 9 décembre 2020, apparaît désormais le terme de Qualité de vie et des conditions de travail (QVCT). En mettant l’accent sur les conditions d’exercice effectif du travail, la QVCT souligne que la QVT est avant tout une affaire d’organisation et de situations concrètes de travail.
Le mot QVCT s’impose dans le 4ème Plan Santé au Travail (2021-2025) et commence à concurrencer le terme QVT dans les usages professionnels. Dans les faits, on ne constate pas pour autant de changement réel. Le mot QVCT sonne davantage comme un rappel à l’ordre pour qui serait tenté de limiter la QVT à la seule question de la convivialité et de l’ambiance de travail.
🔍 Pour approfondir : QVCT : 4 questions pour comprendre
Nos intervenant·es au LAD animent des ateliers et temps de discussion autour de la QVT.
Le bien-être au travail
Le bien-être au travail est une notion également couramment utilisée dans beaucoup d’entreprises. L’ANI réfère elle-même dans sa définition de la QVT au “sentiment de bien-être au travail”. Quelle différence peut-on arbitrer entre les deux notions ?
Le bien-être au travail met davantage l’accent sur la dimension subjective, la perception que chacun.e a de ses conditions de son travail, l’expérience et le vécu des situations de travail, les pensées et émotions qui en résultent.
Subjectif ne signifie pas insaisissable. La notion de bien-être a donné lieu à une très riche littérature scientifique. Pour simplifier, on retient généralement 3 dimensions du bien-être :
- la satisfaction qui correspond à la dimension cognitive du bien-être, comment j’évalue notamment par rapport aux autres ou à la réalisation de mes objectifs.
- le plaisir, qui correspond à la dimension émotionnelle, le ressenti par rapport à une expérience vécue, les sentiments qui en résultent
- la réalisation de soi, également appelée dimension eudémonique, qui peut correspondre au sens qu’on met dans son travail ou au sentiment de maîtrise sur sa vie
Par exemple, un employé du secteur médico-social peut avoir des journées stressantes (dimension émotionnelle) et être mécontent de sa rémunération (dimension cognitive) tout en ayant le sentiment de s’épanouir dans son travail parce qu’il en tire beaucoup de sens (dimension eudémonique).
Le bonheur au travail : l’impossible définition
L’engouement autour du bonheur au travail ces dernières années, depuis le succès du reportage de Martin Meissonnier diffusé sur ARTE à l’éclosion des postes de Chief Happiness Officer en entreprise, continue a suscité débat et critiques.
Pour donner une définition du bonheur au travail, il faudrait déjà s’accorder sur une définition du bonheur. Et de Platon à Spinoza, en passant par Aristote ou Epicure, le bonheur constitue un sujet philosophique passionnant. Pour une approche romanesque, on vous conseille même le réjouissant « Problème Spinoza » d’Irvin Yalom. Mais le bonheur fait appel à des définitions et des représentations très différentes d’une personne à l’autre, d’une époque à l’autre.
C’est pourquoi le terme de bonheur au travail ne bénéficie pas d’une définition reconnue comme la QVT. Il est à la fois moins utilisé dans la recherche académique, et moins apprécié des partenaires sociaux et des structures institutionnelles, qui lui préfèrent les notions de qualité de vie au travail ou conditions de travail, plus objectivables. Dans leur essai Happycratie, Eva Illouz et Edgar Cabanas, s’inquiètent également des risques que nous courons à confier notre bonheur à nos employeurs et employeuses, des structures privées ou autres “marchand·es de bonheur”.
Il reste que le succès du “bonheur au travail” a eu le mérite de diffuser plus largement quelques bonnes pratiques issues de la psychologie positive : l’importance de la reconnaissance et des feedbacks positifs ou le besoin de connaître et s’appuyer sur ses forces pour mieux faire et apprécier son travail.
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Les Risques psychosociaux (RPS)
la définition du rapport Gollac-Bodier
Les risques psychosociaux sont définis comme un risque pour la santé physique et mentale des travailleuses et travailleurs. La notion s’est développée rapidement au milieu des années 2000, dans la foulée des vagues de suicide au travail, qui ont alerté l’opinion et incité le législateur à agir.
Dans le langage courant, les RPS recouvrent souvent à la fois des origines et des conséquences du mal-être au travail : stress, burnout, dépression, violence psychologique, fatigue, harcèlement moral, etc.
👉 A lire : Nos articles Santé mentale : 3 clés pour agir et Harcèlement moral au travail : définition, conseils et réactions pour une meilleure prévention de la santé mentale au travail
Le Rapport Gollac-Bodier de 2011, qui a servi de référence ensuite pour la mise en place de politiques de prévention, propose la définition suivante des RPS :
« Les risques pour la santé mentale, physique et sociale, engendrés par les conditions d’emploi et les facteurs organisationnels et relationnels susceptibles d’interagir avec le fonctionnement mental. »
Le rapport identifie notamment 6 facteurs de risque : l’intensité et le temps de travail, les exigences émotionnelles, le manque d’autonomie, les rapports sociaux au travail dégradés, les conflits de valeur et l’insécurité de la situation de travail.
D’un point de vue juridique, les RPS constituent aujourd’hui la notion la plus solide, à la fois devant les juridictions sociales et en matière de responsabilité pénale de l’employeur.
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Des RPS à la QVT
De manière générale, on observe un glissement sémantique depuis 10 ans en faveur de la notion de QVT, moins clivante et moins axée sur les seuls facteurs de risque.
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Le périmètre diffère également. La Qualité de vie au travail dépasse le champ classique de la santé au travail et des risques professionnels, pour envisager l’écosystème de l’entreprise dans son ensemble. Elle s’intéresse plus largement aux mutations de l’entreprise, à la fonction du management, aux enjeux sociétaux comme l’égalité professionnelle ou encore à la participation des salarié.es à la gestion et la gouvernance.
Cette souplesse dans la définition et la mise en oeuvre de la QVT devrait logiquement favoriser sa diffusion plus large, au-delà des grands groupes, vers un public de PME, de TPE, de startups et d’administrations. Que du bonheur en somme !